18 avril 2007

hydro

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Qui inventera la nage pour cette eau-là ?


Chaque jour
je reçois de moi-même
ce que l'usage est d'appeler
de « mauvaises nouvelles »
et ces lettres bordées de noir
je les déchire
je les jette aux corneilles

Chaque aube
dans la forêt que j'avais plantée
je m'égare
jusqu'à l'arbre seigneurial
jusqu'à la plus haute branche
jusqu'au plus ancien souvenir
et je m'y pends

Chaque matin
je me porte en terre
mais je suis seul à marcher derrière moi
maigre cortège
dans ces campagnes obscures
qui n'ont ni horizon ni forme

Chaque midi je renais
et je creuse
d'autres chantent moi je creuse
cela fait quelques années déjà
suis bien enfoui dans ce terrier magique
ne perçois plus vos voix
et pour mes oreilles aujourd'hui
même le mot solitude
sonne comme une rumeur nombreuse
comme un refrain presque frivole

De la nuit à la nuit je fouille la montagne
ombres m'entendez-vous ? m'entends-tu l'imposteur ?
m'entendez-vous creuser ? j'en atteindrai le coeur
où le rire et le sel ont la même saveur
j'en attendrai le coeur et le ferai sauter

(Nicolas Bouvier, Le dehors et le dedans)
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