16 juin 2008

Lueur de minuit

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« Il a laissé de l'or dans la poussière de son passage. »


La lune dans la forge est entrée
En son jupon de nard empesé.
L'enfant regarde la regarde.
L'enfant est là qui la regarde.
Et dans les airs commotionnés
La lune aux deux bras écartés
A découvert lubrique et pure
ses deux seins de métal dur.
Lune lune lune va-t-en.
Car si surgissaient les gitans
Avec ton coeur ils forgeraient
Colliers et bagues d'argent.
Laisse l'enfant je veux danser.
Et lorsque viendront les gitans
Sur l'enclume ils te trouveront
Tes petits yeux fermés seront.
Lune lune lune va-t-en
Ce sont leurs chevaux que j'entends.
Laisse l'enfant tu vas froisser
Cette blancheur amidonnée.
Mais au trot le cheval accourt
Bat la plaine comme tambour.
Au fond de la forge est l'enfant
Et ses yeux bleus sont clos à présent.

Du champ d'oliviers émergeant
Cuivre et songe : les gitans.
Tête levée et le port haut
Ils ont les yeux à demi clos.

Comme elle chante la chouette-effraie !
Oh ! Comme elle chante sur la haie !
Au ciel la lune s'élevant
Qui tient d'une main un enfant.

Et dans la forge les gitans
Versent des larmes en criant.
Mais le ciel la couvre et la voile
La ciel l'a couverte d'un voile.

(Federico García Lorca, Romancero gitan)
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